Rien n’était plus pareil depuis quelques jours, et pour cause; alors que je pensais mon mari décédé depuis maintenant cinq mois, que je pensais l’avoir vu mourir dans cet accident d’avion dans lequel nous avions été tous les deux impliqués, même si cela avait été flou, rapide et surtout troublant, j’avais appris que j’avais été complètement bernée par des forces devant lesquelles j’étais complètement impuissante et qu’en fait, Andrea était toujours en vie, de retour à Lakeview, dans un état qui ne lui ressemblait pas du tout. Depuis son retour, je faisais mon possible pour lui venir en aide comme je le pouvais, de tenter de comprendre ce qui s’était passé, mais son comportement, les évènements, tout me dépassait, me stressait, ce qui était être loin d’être bon dans ma situation actuelle. Dépassée par tout cela, je n’arrivais pas vraiment à tout gérer cela par moi-même, et c’était pourquoi je sentais le besoin d’en parler à quelqu’un, quelqu’un qui pourrait m’aider, me conseiller. Pour cela, j’avais pensé à plusieurs personnes, mais aujourd’hui, j’avais envie de me tourner vers ma cousine de qui j’avais toujours été proche. De ce fait, sitôt que j’avais pu quitter la demeure d’Adam où je résidais temporairement, je me rendis au restaurant où elle travaillait, m’attendant à la trouver dès que je rentrerais. Toutefois, ce ne fut pas le cas; une autre personne, un homme m’interpella à ce moment, et je ne pus cacher le fait que j’eus une hésitation devant cette personne qui paraissait surprise de me voir, autant que moi. Puis, fouillant rapidement dans mes souvenirs, je parvins finalement à lâcher un : « Kheyran !? », n’en revenant pas de le voir en ces lieux, puisque la dernière fois que je l’avais vu, si c’était bel et bien lui, c’était il y a de nombreuses années… Le hasard faisait étrangement les choses parfois.

Je demeurai bouche-bée l’espace d’un instant tandis que je considérais mon ami de longue date qui avait mûri, c’était certain, mais qui au fond, avait des traits reconnaissables me disant en même temps qu’il n’avait pas trop changé. Puis, je finis par sourire quand il me confirma que c’était bel et bien lui, me disant que c’était la moindre des choses, malgré l’effet de surprise et d’imprévu qui me laissait un peu clouée sur place, ne me permettant pas de le prendre dans mes bras ou quelque chose du genre. De plus, il ne semblait pas vraiment d’enclin à faire de même, me demandant d’office s’il pouvait m’être utile en quelque chose. À cet instant précis, je secouai la tête, réalisant que je devais passer au-dessus de ma surprise et dire quelque chose à un moment donné. Toutefois, le quelque chose sortit un peu plus maladroitement que je l’aurais imaginé, c’est-à-dire que je dis, un peu confuse : « Hum… En fait, je venais voir Ashleigh… Elle travaille aujourd’hui ? » Je me doutais bien que oui, ou du moins, je l’espérais, mais en même temps, je ne pouvais pas nier le fait que je me sentais un peu désagréable de laisser Kheyran en plan alors que je ne l’avais pas vu depuis je ne savais pas combien de temps, ce qui me semblait être une éternité compte tenu de tout ce qui s’était passé dans ma vie récemment. Après, je savais bien que j’étais venue discuter d’un sujet on ne peut plus délicat à ma cousine, mais me disant que ça pouvait quand même attendre un peu, que ce n’était pas tous les jours qu’on retrouvait un vieil ami, et j’esquissai alors un sourire, disant, un peu moins nerveuse et perturbée, ou du moins, je l’espérais : « Je suis contente de te voir. Comment ça va ? » Je savais bien que je changeais de sujet bien rapidement, mais je me disais que c’était la bonne cause, et que Kheyran ne m’en voudrait probablement pas, sauf s’il n’était pas content de me voir, ce qui m’étonnerait, ou du moins, je ne l’espérais pas.